La Commission européenne a adopté ce jour un encadrement temporaire de crise afin de permettre aux États membres d'exploiter la flexibilité prévue par les règles en matière d'aides d'État pour soutenir l'économie dans le contexte de l'invasion de l'Ukraine par la Russie.
Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence, a déclaré à ce propos:
«En ce moment critique, l'Union européenne demeure solidaire de l'Ukraine et de sa population. Nous devons nous opposer à cette invasion cruelle car c'est également notre liberté qui est en jeu.
Les sanctions adoptées par l'UE et ses partenaires internationaux ont eu de sérieuses répercussions sur l'économie russe.
Ces sanctions pèsent également lourdement sur l'économie européenne et cette situation se prolongera dans les prochains mois. Nous devons atténuer les conséquences économiques de cette guerre et soutenir les entreprises et les secteurs durement touchés. Et nous devons agir de manière coordonnée.
Dans cette optique, la Commission permettra aux États membres d'exploiter la flexibilité prévue par les règles en matière d'aides d'État pour faire face à cette situation sans précédent, tout en préservant des conditions de concurrence équitables au sein du marché unique.
L'encadrement temporaire de crise complète la vaste panoplie actuelle d'instruments en matière d'aides d'État dont disposent déjà les États membres, telles que des mesures d'indemnisation des entreprises pour les dommages directement subis en raison de circonstances exceptionnelles, et des mesures exposées dans les communications de la Commission sur l'évolution du marché de l'énergie.
Le nouvel encadrement permettra aux États membres i) d'accorder un montant d'aides limité aux entreprises touchées par la crise actuelle ou par les sanctions et contre-sanctions qui s'y attachent, ii) de garantir la disponibilité de liquidités suffisantes pour les entreprises, et (iii) d'indemniser les entreprises pour les surcoûts dus aux prix exceptionnellement élevés du gaz et de l'électricité.
Ces types de mesures seront également accessibles aux entreprises qui peuvent être considérées comme étant en difficulté étant donné qu'elles sont susceptibles d'être confrontées à des besoins de liquidité pressants en raison de la situation actuelle qui arrive juste après la pandémie de coronavirus. Les entités contrôlées par la Russie soumises aux sanctions seront exclues du champ d'application de ces mesures.
Pour donner un exemple important: si les États membres veulent réduire au minimum l'incidence de la forte augmentation du coût des intrants, ils peuvent immédiatement mettre en place des régimes d'aides permettant d'octroyer jusqu'à 400 000 euros par entreprise touchée par la crise. La Commission est prête à travailler avec les États membres immédiatement pour trouver des solutions efficaces pour préserver ce pan important de notre économie, en exploitant totalement la flexibilité offerte par les règles en matière d'aides d'État.
Afin de préserver des conditions de concurrence équitables au sein du marché unique, le nouvel encadrement temporaire de crise comporte un certain nombre de garde-fous. Les États membres sont également invités à inclure des exigences en matière de durabilité pour l'octroi d'aides du fait des coûts supplémentaires de l'énergie liés aux prix élevés du gaz et de l'électricité.
La Commission continuera à suivre la situation et à apporter le soutien nécessaire aux pouvoirs publics et aux citoyens.»
Contexte
Fondé sur l'article 107, paragraphe 3, point b), du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne («TFUE»), l'encadrement temporaire de crise en matière d'aides d'État visant à soutenir l'économie dans le contexte de l'invasion de l'Ukraine par la Russie reconnaît que l'économie de l'UE est confrontée à une perturbation grave. Pour y remédier, l'encadrement temporaire de crise prévoit trois types d'aides:
- montants d'aide limités: les États membres pourront mettre en place des régimes permettant d'octroyer jusqu'à 35 000 euros aux entreprises touchées par la crise exerçant des activités dans les secteurs de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture et jusqu'à 400 000 euros par entreprise touchée par la crise exerçant des activités dans tous les autres secteurs. Cette aide ne doit pas nécessairement être liée à une hausse des prix de l'énergie, car la crise et les mesures restrictives prises contre la Russie ont de multiples répercussions sur l'économie, notamment des ruptures matérielles de chaînes d'approvisionnement. Ce soutien peut être accordé sous quelque forme que ce soit, y compris sous la forme de subventions directes.
- soutien de trésorerie sous la forme de garanties publiques et de prêts bonifiés: les États membres pourront fournir i) des garanties publiques bonifiées pour faire en sorte que les banques continuent d'accorder des prêts à toutes les entreprises touchées par la crise actuelle; et ii) des prêts publics et privés assortis de taux d'intérêt bonifiés;
- les États membres peuvent accorder des garanties publiques ou mettre en place des régimes de garanties pour couvrir les prêts bancaires contractés par des entreprises. Ces prêts s'accompagneraient de primes bonifiées, avec des réductions sur le taux de marché estimé en ce qui concerne les primes annuelles appliquées aux nouveaux prêts pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les autres entreprises;
- les États membres peuvent autoriser l'octroi aux entreprises de prêts publics et privés assortis de taux d'intérêt bonifiés. Ces prêts doivent être accordés à un taux d'intérêt au moins égal au taux de base sans risque majoré de primes pour risque de crédit spécifiques pour les PME et les autres entreprises.
Pour les deux types de soutien, certaines limites s'appliquent concernant le montant maximal du prêt, sur la base des besoins opérationnels d'une entreprise, compte tenu de son chiffre d'affaires, des coûts de l'énergie qu'elle doit supporter ou de ses besoins de trésorerie spécifiques. Les prêts peuvent porter à la fois sur des crédits aux investissements et sur des besoins en fonds de roulement;
- aides destinées à indemniser pour les prix élevés de l'énergie: les États membres pourront indemniser partiellement les entreprises, en particulier les gros consommateurs d'énergie, pour les surcoûts dus à des hausses exceptionnelles des prix du gaz et de l'électricité. Ce soutien peut être accordé sous quelque forme que ce soit, y compris sous la forme de subventions directes. Le montant total de l'aide par bénéficiaire ne peut à aucun moment dépasser 30 % des coûts admissibles jusqu'à un maximum de 2 millions d'euros. Lorsque l'entreprise subit des pertes d'exploitation, une aide supplémentaire peut s'avérer nécessaire pour assurer la poursuite d'une activité économique. À cette fin, les États membres peuvent accorder des aides au-delà de ces plafonds, jusqu'à 25 millions d'euros pour les gros consommateurs d'énergie, et jusqu'à 50 millions d'euros pour les entreprises exerçant des activités dans certains secteurs spécifiques, comme la production d'aluminium et d'autres métaux, de fibres de verre, de pâte à papier, d'engrais ou d'hydrogène et de nombreux produits chimiques de base.
L'encadrement temporaire de crise aidera à cibler le soutien à l'économie, tout en limitant les conséquences négatives sur l'équité des conditions de concurrence au sein du marché unique.
L'encadrement temporaire de crise comporte donc un certain nombre de garde-fous:
- méthodologie proportionnelle: il doit exister un lien entre le montant des aides qui peuvent être accordées aux entreprises et l'ampleur de leur activité économique et de leur exposition aux effets économiques de la crise, compte tenu de leur chiffre d'affaires et des coûts de l'énergie qu'elles doivent supporter;
- conditions d'admissibilité: la définition des gros consommateurs d'énergie est établie par référence à l'article 17, paragraphe 1, point a), de la directive sur la taxation de l'énergie, c'est-à-dire les entreprises dont les achats de produits énergétiques atteignent au moins 3 % de la valeur de la production;
- exigences en matière de durabilité: les États membres sont invités à envisager, d'une manière non discriminatoire, de fixer des exigences en matière de protection de l'environnement ou de sécurité d'approvisionnement lors de l'octroi d'aides pour les surcoûts dus aux prix exceptionnellement élevés du gaz et de l'électricité. Ces aides devraient donc aider les entreprises à faire face à la crise actuelle tout en jetant les bases d'une reprise durable.
L'encadrement temporaire de crise sera en place jusqu'au 31 décembre 2022. Afin de garantir la sécurité juridique, la Commission évaluera avant cette date s'il est nécessaire de le prolonger. En outre, durant sa période d'application, la Commission continuera d'examiner le contenu et le champ d'application de l'encadrement à la lumière des évolutions observées en ce qui concerne les marchés de l'énergie, d'autres marchés d'intrants et la situation économique générale.
L'encadrement temporaire de crise adopté aujourd'hui vient s'ajouter à l'éventail de possibilités dont disposent les États membres pour mettre au point des mesures conformes aux règles de l'Union en matière d'aides d'État. Ces règles permettent par exemple aux États membres d'aider les entreprises qui font face à des pénuries de liquidités et ont besoin d'une aide au sauvetage urgente. En outre, l'article 107, paragraphe 2, point b), du TFUE permet aux États membres d'indemniser les entreprises pour les dommages directement causés par un événement extraordinaire, tels que ceux causés par la crise actuelle.
La Commission avait précédemment adopté un cadre temporaire en 2008, en réaction à la crise financière mondiale.
Le 19 mars 2020, elle a adopté un encadrement temporaire dans le contexte de la flambée de coronavirus. L'encadrement temporaire COVID a été modifié les 3 avril, 8 mai, 29 juin et 13 octobre 2020, ainsi que les 28 janvier et 18 novembre 2021.
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Détails
- Date de publication
- 23 mars 2022
- Auteur
- Représentation au Luxembourg