Merci Madame la Présidente, chère Roberta,
Monsieur le Président, cher Charles,
Mesdames et Messieurs les Députés,
À l'occasion de la réunion extraordinaire du Conseil européen, l'attention s'est effectivement portée en grande partie sur notre facilité pour l'Ukraine de 50 milliards d'euros. Et à juste titre. Nous fournissons à l'Ukraine non seulement les financements visant à maintenir à flot son économie, mais également des perspectives fiables pour les quatre prochaines années. Votre assemblée a soutenu notre proposition depuis les premiers jours. Et aujourd'hui, je souhaite vous remercier pour ce soutien inébranlable. Voilà ce que signifie de se tenir aux côtés de l'Ukraine aussi longtemps qu'il le faudra. Votre approbation nous permettra d'effectuer d'importants paiements en faveur de l'Ukraine dès le mois de mars. Étant donné que l'Ukraine fera l'objet du prochain débat, permettez-moi de me concentrer sur d'autres questions évoquées lors du Conseil européen extraordinaire.
Le Conseil européen extraordinaire a également convenu de la toute première - et j'insiste: la toute première - révision de notre budget pluriannuel. Les priorités que la Commission a présentées en juin dernier ont été confirmées. Et je suis très satisfaite que nous ayons obtenu 80 % des financements que nous avions sollicités. Nous avons évidemment dû faire des choix difficiles, mais le résultat actuel est très satisfaisant. Nous serons désormais à même d'intensifier notre lutte contre la migration irrégulière et de mieux protéger nos frontières extérieures. Nous disposons maintenant des moyens pour dialoguer de manière encore plus approfondie avec les pays du voisinage méridional. Et je suis très heureuse que le plan de croissance pour les Balkans occidentaux dispose à présent d'une assise financière solide. Nous pourrons également améliorer notre capacité de réaction aux catastrophes naturelles dans les États membres et aux crises humanitaires, à Gaza par exemple. Et au moyen de la plateforme STEP, nous soutiendrons les technologies critiques «made in Europe». Cet accord fournit à l'Europe les ressources financières permettant d'affronter quelques-uns des principaux défis de cette décennie. Je souhaite remercier le Parlement européen pour le soutien qu'il nous a apporté jusqu'à présent. Et je compte bien entendu sur votre accord.
Mesdames et Messieurs les Députés,
Pendant que se réunissait le Conseil européen, des agriculteurs et des agricultrices de toute l'Europe sont descendus dans les rues. Nombre d'entre eux se sentent acculés. Les agriculteurs sont les premiers à ressentir les effets du changement climatique. Les sécheresses et les inondations détruisent leurs récoltes et menacent le bétail. Ils ressentent les répercussions de la guerre menée par la Russie. L'inflation, la hausse des coûts de l'énergie et des engrais. Malgré cela, ils travaillent dur chaque jour pour produire les aliments de qualité que nous consommons. Ils méritent pour cela, me semble-t-il, toute notre reconnaissance, nos remerciements et notre respect.
C'est vrai. Les problèmes se sont accumulés ces dernières années. Nos agriculteurs et agricultrices méritent d'être écoutés. Je sais qu'ils s'inquiètent pour l'avenir du secteur agricole et pour leur avenir en tant qu'agriculteurs. Mais ils savent aussi que l'agriculture doit s'orienter vers un modèle de production plus durable, afin que leurs exploitations restent rentables dans les années à venir. Et nous voulons faire en sorte que, durant ce processus, les agriculteurs restent aux commandes.
C'est pourquoi nous avons lancé le dialogue stratégique sur l'avenir de l'agriculture dans l'Union européenne. Nous avons invité un large éventail de représentants du secteur agricole, les jeunes agriculteurs, les communautés rurales, l'industrie des semences et des engrais, le secteur agroalimentaire, le secteur de la transformation, mais aussi le secteur financier, le secteur de la finance coopérative, les associations de consommateurs et de défense de l'environnement, et bien sûr le monde scientifique. Il nous faut analyser ensemble la situation, partager des idées et, surtout, élaborer des scénarios pour l'avenir. Il nous faut aller au-delà d'un débat polarisé et instaurer la confiance. La confiance est la base essentielle de solutions viables.
L'enjeu pour nous tous est de taille. Notre filière agroalimentaire européenne est sans pareille. La diversité de nos cultures et de nos traditions se reflète dans les rayons de nos supermarchés. L'Europe a les produits alimentaires de la plus haute qualité et les plus sains au monde, grâce à nos agriculteurs. Ils jouent un rôle central dans ce système, et bien entendu, ils méritent pour cela un salaire équitable. Il est vrai que notre soutien à ce secteur est massif. Notre politique agricole commune est très fortement soutenue par le budget de l'Union. L'argent, c'est important – mais cela ne fait pas tout. Des ressources naturelles saines sont également essentielles pour le maintien de bons rendements. En particulier, des sols fertiles ont toujours constitué la meilleure garantie pour que les agriculteurs puissent vivre de leur travail. Or nous savons qu'aujourd'hui, de 60 à 70 % des sols en Europe sont en mauvais état. Nous pouvons inverser cette tendance. Et c'est précisément ce que font de nombreux agriculteurs. Mais nous devons faire davantage encore.
Pour une protection efficace de la nature, il faut que les incitations à intervenir soient généreuses. Les agriculteurs ont besoin de raisons économiques de prendre des mesures de protection de la nature – peut-être ne leur avons-nous pas exposé ces raisons de manière convaincante. De vraies incitations ne se limitant pas à compenser la perte de rendement sont nécessaires. Ces incitations peuvent être fournies par des subventions publiques, par exemple au moyen de labels de qualité, en coopération avec les distributeurs et les entreprises de transformation. En d'autres termes, la protection de la nature ne peut réussir qu'avec une approche ascendante reposant sur les incitations. Car ce n'est que si nos agriculteurs et nos agricultrices peuvent vivre de leurs terres qu'ils investiront dans l'avenir. Et ce n'est que si nous atteignons ensemble nos objectifs en matière de climat et d'environnement qu'ils pourront continuer à gagner leur vie.
Nos agriculteurs en sont bien conscients. Et nous devrions leur faire davantage confiance. Permettez-moi de vous donner un exemple. La Commission a proposé le règlement SUR, qui a pour but louable de réduire les risques des produits phytopharmaceutiques. Mais la proposition SUR est devenue un symbole de polarisation. Elle a été rejetée par le Parlement européen. Il n'y a plus de progrès non plus au Conseil. Il faut donc agir. C'est pourquoi je proposerai au collège de retirer cette proposition. Mais bien sûr, le sujet reste d'actualité. Et pour avancer, davantage de dialogue et une approche différente sont nécessaires. Sur cette base, la Commission pourrait faire une nouvelle proposition beaucoup plus aboutie, et avec la participation des parties prenantes.
Mesdames et Messieurs les Députés,
Les mois qui viennent ne vont pas être simples. Mais je pense qu'une importante occasion s'offre aujourd'hui à nous. Tous ceux présents dans cette assemblée mesurent bien que notre secteur agroalimentaire – à commencer par les exploitations agricoles – a besoin de perspectives à long terme, ainsi que d'une volonté de s'écouter mutuellement et de rechercher des solutions communes. Nous devons éviter de nous rejeter mutuellement la faute, et chercher ensemble des solutions aux problèmes. Le rapport que produira le dialogue stratégique sur l'avenir de l'agriculture dans l'Union européenne doit être présenté d'ici la fin de l'été, et il aura une importance considérable. Les résultats et les recommandations de ce dialogue seront discutés au Parlement, ainsi qu'avec les États membres, et ils formeront le fondement de notre future politique agricole.
Je vous remercie pour votre attention.
Détails
- Date de publication
- 6 février 2024
- Auteur
- Représentation au Luxembourg