Aller au contenu principal
Représentation au Luxembourg
  • Article d’actualité
  • 22 juillet 2024
  • Représentation au Luxembourg
  • 8 min de lecture

La Commission coordonne une action des autorités nationales de protection des consommateurs contre Meta au sujet de son modèle «payer ou consentir»

Visit of Grigor Minasyan, Armenian Minister for Justice, to the European Commission

Le réseau de coopération en matière de protection des consommateurs (CPC) a envoyé aujourd'hui une lettre à Meta en raison de préoccupations quant au fait que le modèle «payer ou consentir» pourrait enfreindre le droit européen en matière de protection des consommateurs. La Commission a coordonné cette action menée par la direction générale française de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L'action a débuté en 2023, immédiatement après que Meta avait demandé aux consommateurs, du jour au lendemain, soit de s'abonner pour utiliser Facebook et Instagram contre paiement, soit de consentir à l'utilisation par Meta de leurs données à caractère personnel afin d'obtenir l'affichage de publicités personnalisées, permettant à l'entreprise d'en tirer des recettes («payer ou consentir»).

Les autorités de protection des consommateurs ont apprécié plusieurs éléments susceptibles de constituer des pratiques trompeuses ou agressives, plus particulièrement la question de savoir si Meta a fourni d'emblée aux consommateurs des informations exactes, claires et suffisantes. Elles ont analysé si ces informations permettaient aux consommateurs de comprendre les implications de leur décision de payer ou d'accepter le traitement de leurs données à caractère personnel à des fins commerciales sur leurs droits en tant que consommateurs. En outre, les autorités du réseau CPC craignent que de nombreux consommateurs aient été exposés à des pressions indues pour choisir rapidement entre les deux modèles, de peur de perdre immédiatement l'accès à leurs comptes et à leur réseau de contacts.

Cette action coordonnée du réseau CPC contre Meta vient s'ajouter à d'autres procédures européennes et nationales en cours concernant le même modèle. L'action d'aujourd'hui porte en particulier sur l'appréciation des pratiques de l'entreprise au regard du droit européen en matière de protection des consommateurs et est distincte des enquêtes en cours menées par la Commission contre l'entreprise pour violation potentielle du règlement sur les marchés numériques par son modèle «payer ou consentir», de la demande formelle d'informations de la Commission au titre du règlement sur les services numériques et de l'appréciation réalisée par la commission irlandaise de la protection des consommateurs au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD).

Principaux éléments de l'action contre Meta

Les autorités du réseau CPC ont recensé plusieurs pratiques dans le contexte du déploiement par Meta de son nouveau modèle commercial suscitant des préoccupations et susceptibles d'être considérées comme déloyales et contraires à la directive sur les pratiques commerciales déloyales et à la directive sur les clauses abusives dans les contrats:

  • le fait d'induire les consommateurs en erreur en utilisant le terme «gratuit» alors que, pour les utilisateurs qui ne souhaitent pas souscrire à un abonnement payant, Meta leur impose d'accepter que l'entreprise puisse tirer des recettes de l'utilisation de leurs données à caractère personnel pour leur afficher des publicités personnalisées;
  • le fait de créer dans la confusion dans l'esprit des utilisateurs en leur imposant de naviguer sur différents écrans de l'application ou de la version web de Facebook/Instagram et de cliquer sur des hyperliens les orientant vers différentes parties des conditions de service ou de la politique de confidentialité pour savoir comment Meta utilisera leurs préférences, leurs données à caractère personnel et les données générées par les utilisateurs pour leur afficher des publicités personnalisées;
  • l'utilisation de termes et d'un langage imprécis, tels que «Vos informations» pour désigner les «données à caractère personnel» des consommateurs, ou le fait de suggérer que les consommateurs qui décident de payer ne verront aucune publicité, alors qu'ils pourraient toujours en voir lorsqu'ils s'intéressent à des contenus partagés par l'intermédiaire de Facebook ou d'Instagram par d'autres membres de la plateforme;
  • le fait de faire pression sur les consommateurs qui ont toujours utilisé Facebook/Instagram gratuitement jusqu'à l'introduction du nouveau modèle commercial, et pour lesquels Facebook/Instagram constituent souvent une part importante de leur vie sociale et de leurs interactions sociales, pour qu'ils fassent un choix immédiat, sans leur donner un avertissement préalable, un temps suffisant et une possibilité réelle d'évaluer comment ce choix pourrait avoir une incidence sur leur relation avec Meta, en ne leur donnant pas accès à leur compte avant qu'ils n'aient fait leur choix.

Étapes suivantes

Meta a jusqu'au 1er septembre 2024 pour répondre à la lettre du réseau CPC et de la Commission et pour proposer des solutions. Si Meta ne prend pas les mesures nécessaires pour résoudre les problèmes soulevés dans la lettre, les autorités du réseau CPC pourront décider de prendre des mesures d'exécution, y compris des sanctions.

Contexte

Coopération transfrontière en matière d'application de la législation au titre du règlement CPC (UE) 2017/2394

Le réseau CPC est un réseau d'autorités chargées de faire appliquer la législation de l'Union relative à la protection des consommateurs. En vertu du règlement relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs, et sous la coordination de la Commission européenne, il peut prendre des mesures pour résoudre des problèmes transfrontières au niveau de l'UE. En outre, dans le même cadre, les associations de consommateurs, telles que le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), peuvent publier des alertes sur les menaces émergentes sur le marché; leurs informations sont ensuite directement accessibles aux autorités chargées de faire appliquer la législation.

Le 30 novembre 2023, le BEUC a alerté le réseau CPC au sujet de pratiques potentiellement trompeuses et agressives dans le nouveau modèle d'abonnement de Meta. En outre, les autorités du réseau CPC de différents États membres ont reçu plusieurs plaintes d'organisations nationales à ce propos.

Dispositions pertinentes du droit matériel en matière de protection des consommateurs

Les articles 5 à 9 de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur interdisent les pratiques commerciales déloyales sous la forme d'actions trompeuses ou agressives ou d'omissions trompeuses. La communication de la Commission européenne intitulée «Orientations concernant l'interprétation et l'application de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales» fournit d'autres informations spécifiques sur les allégations qui peuvent être considérées comme trompeuses au regard de ladite directive.

L'article 3 de la directive concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs interdit les clauses contractuelles qui, en dépit de l'exigence de bonne foi, créent au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. La communication de la Commission européenne intitulée «Orientations relatives à l'interprétation et à l'application de la directive 93/13/CEE du Conseil concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs» fournit des informations spécifiques sur les clauses contractuelles qui doivent être considérées comme déloyales.

Le 1er mars 2024, la Commission a adressé à Meta une demande d'informations au titre du règlement sur les services numériques afin d'obtenir davantage d'informations sur les options d'abonnement sans publicité pour Facebook et Instagram que Meta a introduites pour les utilisateurs de l'UE en novembre 2023.

Le 25 mars 2024, la Commission a ouvert une procédure contre Meta afin d'examiner si le modèle «payer ou consentir», introduit pour les utilisateurs de l'UE en novembre 2023, respecte l'article 5, paragraphe 2, du règlement sur les marchés numériques, qui impose aux contrôleurs d'accès, tels que Meta, d'obtenir le consentement des utilisateurs lorsqu'ils ont l'intention de combiner leurs données à caractère personnel entre les services de plateforme essentiels désignés et d'autres services. Le 1er juillet 2024, la Commission a envoyé ses constatations préliminaires à Meta, l'informant que son modèle publicitaire «payer ou consentir» ne respecte pas le règlement sur les marchés numériques.  

Pour en savoir plus

Réseaux sociaux et moteurs de recherche – Commission européenne

Informations supplémentaires sur les actions visant à faire respecter les droits des consommateurs

Directive relative aux pratiques commerciales déloyales

Réseau de coopération en matière de protection des consommateurs

Citation(s)

 

Nous n’allons pas rester les bras croisés alors que des pratiques sournoises induisent les consommateurs en erreur. Nous sommes fiers de notre solide législation en matière de protection des consommateurs qui confère aux Européens le droit d’être correctement informés de changements tels que celui proposé par Meta. Dans l’UE, les consommateurs sont en mesure de faire des choix réellement éclairés et nous prenons maintenant des mesures pour protéger ce droit.

Věra Jourová, vice-présidente chargée des valeurs et de la transparence

 

Les consommateurs ne doivent pas être amenés de manière trompeuse à croire que soit ils paieraient et ne verraient plus aucune publicité, soit ils bénéficieraient gratuitement d’un service, alors qu’ils accepteraient plutôt que l’entreprise utilise leurs données à caractère personnel pour générer des recettes grâce aux publicités. Le droit européen en matière de protection des consommateurs est clair à cet égard. Les professionnels doivent informer les consommateurs d’emblée et de manière totalement transparente sur la manière dont ils utilisent leurs données à caractère personnel. Il s’agit d’un droit fondamental que nous protégerons.

Didier Reynders, commissaire à la justice

Détails

Date de publication
22 juillet 2024
Auteur
Représentation au Luxembourg