Aller au contenu principal
Représentation au Luxembourg
Article d’actualité29 février 2024Représentation au Luxembourg14 min de lecture

Les efforts déployés par la Pologne pour rétablir l'état de droit ouvrent l'accès à des fonds de l'UE pouvant atteindre 137 milliards d'euros

La Commission européenne a adopté aujourd'hui deux actes juridiques qui permettront à la Pologne d'accéder à un financement de l'UE pouvant atteindre 137 milliards d'euros. Ces actes concernent les réformes de l'état de droit que la Pologne a adoptées, ainsi que les mesures récentes et immédiates qu'elle a prises pour atteindre les jalons visant à renforcer l'indépendance de la justice.

Dans le cadre de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), la Commission a achevé son évaluation préliminaire de la première demande de paiement de la Pologne. Elle conclut que la Pologne respecte de manière satisfaisante les deux «super jalons» visant à renforcer des aspects importants de l'indépendance du pouvoir judiciaire polonais, grâce à une réforme du régime disciplinaire applicable aux juges. Le pays respecte également de manière satisfaisante un autre jalon lui imposant d'utiliser Arachne, un outil informatique qui soutient les systèmes d'audit et de contrôle des États membres et assure donc la prévention nécessaire contre la fraude. Une fois confirmée par les États membres, l'évaluation présentée aujourd'hui par la Commission permettrait le versement de 6,3 milliards d'euros (hors préfinancement) dans les semaines à venir, sur un total pouvant atteindre 59,8 milliards d'euros de fonds au titre de la FRR en faveur de la Pologne.

À la suite des réformes susmentionnées, la Commission considère également que la Pologne remplit désormais la condition favorisante horizontale liée à la charte des droits fondamentaux de l'UE. La Pologne peut ainsi accéder à un montant maximal de 76,5 milliards d'euros pour ses programmes de financement dans le domaine de la politique de cohésion, des affaires maritimes, de la pêche et de l'aquaculture ainsi que des affaires intérieures pour la période 2021-2027.

La Commission salut également l'engagement pris par le gouvernement polonais de répondre aux préoccupations de longue date en matière d'état de droit, qui vont au-delà de celles concernant le régime disciplinaire applicable aux juges, en se fondant sur ses recommandations. Lors du Conseil Affaires générales du 20 février 2024, les autorités polonaises ont présenté un plan d'action ambitieux sur l'état de droit en Pologne, afin de régler les questions soulevées par la Commission au titre de la procédure prévue à l'article 7, paragraphe 1.

Mesures visant à renforcer l'indépendance de la justice

La Commission a conclu aujourd'hui que les mesures prises entre juin 2022 et février 2024 ont permis de réformer en profondeur le régime disciplinaire applicable aux juges polonais. Les mesures adoptées par les autorités polonaises renforceront des aspects importants de l'indépendance du pouvoir judiciaire en Pologne, améliorant globalement le climat d'investissement dans le pays:

  • la chambre disciplinaire de la Cour suprême a été supprimée et remplacée par une juridiction indépendante et impartiale, établie par une loi adoptée le 9 juin 2022, à savoir la chambre de responsabilité professionnelle (loi de juin 2022);
  • le régime disciplinaire a été réformé et des garanties sont en place pour que les juges ne risquent plus de voir leur responsabilité disciplinaire engagée pour le contenu de leurs arrêts ou l'application du droit de l'Union. Cet objectif a été atteint grâce à la loi de juin 2022 et à l'arrêté du ministre de la justice de février 2024 établissant un cadre pour la nomination de commissaires disciplinaires ad hoc, ce qui a permis de mettre un terme aux procédures disciplinaires injustifiées;
  • tous les juges visés par des décisions de la chambre disciplinaire ont eu droit à un réexamen de leur cas par la nouvelle chambre de la Cour suprême, dans un délai clair et sur la base du nouveau régime défini dans la loi de juin 2022. Tous les juges qui avaient été suspendus à tort ont été réintégrés.

En outre, dans le plan d'action qu'elle a présenté, la Pologne affirme clairement son engagement en faveur du respect de la primauté du droit de l'Union et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE). Cela concerne notamment l'arrêt de la CJUE du 5 juin 2023 (affaire C-204/21), qui dispose que certaines dispositions de la loi polonaise sur les infractions disciplinaires des juges sont contraires au droit de l'Union et impose à toutes les autorités nationales, et en particulier à toutes les juridictions nationales, de ne pas les appliquer.

Ouvrir la voie à des paiements pouvant atteindre 59,8 milliards d'euros de fonds au titre de la FRR

Au terme de son évaluation préliminaire de la première demande de paiement présentée par la Pologne le 15 décembre 2023, la Commission estime que la Pologne respecte de manière satisfaisante les 37 jalons et 1 cible définis dans la décision d'exécution du Conseil portant approbation du PRR polonais. Cela comprend notamment les deux «super jalons» visant à renforcer des aspects importants de l'indépendance du pouvoir judiciaire et un «super jalon» lié à l'audit et au contrôle. Afin de protéger efficacement les intérêts financiers de l'Union, ces trois «super jalons» doivent être respectés avant qu'un paiement ne puisse être effectué à la suite d'une demande de paiement. L'évaluation préliminaire présentée ce jour par la Commission ouvre la voie au versement de 59,8 milliards d'euros de fonds au titre de la FRR (25,3 milliards d'euros sous forme de subventions et 34,5 milliards d'euros sous forme de prêts) par:

  • le lancement de la procédure de versement de la première demande de paiement de la Pologne, d'un montant de 6,3 milliards d'euros (hors préfinancement), ainsi que
  • d'autres décaissements de l'ensemble des fonds de la FRR, pour autant que les jalons et cibles définis dans le plan polonais soient atteints de manière satisfaisante d'ici la fin de 2026.

La première demande de paiement de la Pologne couvre également des étapes importantes de la mise en œuvre de 25 réformes ambitieuses et de cinq investissements clés. Ces mesures visent à améliorer la résilience et la compétitivité de son économie, à faire progresser les transitions écologique et numérique, ainsi qu'à soutenir la santé et la mobilité propre. D'une valeur de 1,4 milliard d'euros, une des mesures les plus importantes du plan polonais concerne des investissements dans le secteur agricole. Des milliers d'agriculteurs et de pêcheurs, ainsi que des PME du secteur agricole bénéficient déjà d'un soutien pour développer et moderniser leur production et accéder à de nouveaux marchés.

Une autre mesure phare concerne une réforme visant à faciliter les investissements dans la construction de parcs éoliens terrestres, ainsi que la refonte du programme national de protection de l'air afin d'améliorer la qualité de l'air en Pologne.

Le respect de la condition favorisante horizontale concernant la charte de l'UE permet à la Pologne d'accéder à des fonds de l'UE pouvant atteindre 76,5 milliards d'euros.

Les conditions favorisantes sont des conditions préalables que les États membres doivent remplir pour garantir une utilisation efficace et efficiente des fonds en gestion partagée au titre du règlement portant dispositions communes.

Après une évaluation approfondie, la Commission a conclu que la Pologne avait fait le nécessaire pour mettre en place des mécanismes et des dispositifs garantissant que les programmes respectent la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès leur conception et tout au long de leur mise en œuvre.

Au moment de l'approbation des programmes en 2022, la Pologne avait elle-même indiqué dans son autoévaluation que cette condition favorisante n'était pas remplie. La Commission a pris note de cette évaluation dans ses décisions d'approbation des programmes polonais.

Pour remédier aux manquements constatés au titre de cette condition favorisante horizontale concernant la charte de l'UE, la Pologne a introduit plusieurs mesures:

  • elle a mis en place des modalités institutionnelles et procédurales efficaces pour garantir le respect de la charte à toutes les étapes de la programmation et de la mise en œuvre des programmes de financement dans le domaine de la politique de cohésion, des affaires maritimes, de la pêche et de l'aquaculture et des affaires intérieures. Les rôles et les responsabilités d'organismes tels que le médiateur des droits de l'homme et les coordinateurs de la charte sont clairement définis. Un mécanisme efficace de traitement des plaintes et des modalités de signalement ont également été mis en place;
  • la Pologne a remédié aux problèmes d'indépendance du pouvoir judiciaire en réformant le régime disciplinaire applicable aux juges. En outre, les juridictions polonaises peuvent engager des procédures de vérification visant à déterminer si un juge satisfait aux exigences d'indépendance découlant de l'article 19 du traité UE sur l'état de droit.

Ces réformes et la décision positive prise aujourd'hui signifient que la Pologne peut commencer à demander des remboursements pour les investissements réalisés dans le cadre de programmes dotés d'environ 76,5 milliards d'euros au titre des programmes de financement de la politique de cohésion, des affaires maritimes et de la pêche et des affaires intérieures pour la période 2021-2027.

Les États membres doivent veiller au respect des conditions favorisantes horizontales et thématiques tout au long de la période de programmation 2021-2027. Comme pour tous les États membres, la Commission suivra de près et en permanence l'application par la Pologne des mesures mises en place, principalement au moyen de comités de suivi, de parties prenantes, de réunions et de rapports annuels d'examen des performances et d'audits.

Si la Commission constate à un moment quelconque qu'une condition favorisante n'est plus remplie, le remboursement des dépenses correspondantes sera suspendu.

La Pologne va rejoindre le Parquet européen

La Commission a également adopté aujourd'hui une décision confirmant la participation de la Pologne au Parquet européen. À la suite de la demande envoyée à la Commission par la Pologne, le Parquet européen sera compétent pour instruire et poursuivre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union commises en Pologne après le 1er juin 2021.

La Pologne fera partie du Parquet européen à compter de la date d'entrée en vigueur de la décision de la Commission. Le Parquet européen pourra entamer ses activités et ses enquêtes en Pologne vingt jours après la nomination du procureur européen polonais par le Conseil.

Contexte

Le plan pour la reprise et la résilience de la Pologne

Le plan pour la reprise de la Pologne sera financé à hauteur de 59,8 milliards d'euros sous forme de prêts et de subventions. La Pologne a reçu à ce jour 5,1 milliards d'euros, dans le cadre du préfinancement lié aux fonds REPowerEU au titre de la FRR. En ce qui concerne la première demande de paiement de la Pologne, d'un montant de 6,3 milliards d'euros (hors préfinancement), la Commission a à présent transmis au comité économique et financier (CEF) son évaluation préliminaire positive quant au respect par la Pologne d'une cible et des 37 jalons requis pour ce premier paiement. Le CEF dispose d'un délai de quatre semaines pour rendre son avis. Les fonds pourront être versés à la Pologne une fois cet avis rendu et après l'adoption d'une décision de paiement par la Commission.

Fonds couverts par le règlement portant dispositions communes pour la période 2021-2027

La politique de cohésion de l'UE, le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture et les fonds «Affaires intérieures» serviront à promouvoir la cohésion économique, sociale et territoriale dans les régions polonaises et à mettre en œuvre les grandes priorités de l'UE, telles que les transitions écologique et numérique.

Ces fonds favoriseront une croissance compétitive, innovante et durable, renforceront l'inclusion sociale et contribueront à développer les compétences des personnes qui éprouvent des difficultés à s'insérer sur le marché du travail.

La stratégie d'investissement du pays au titre de la politique de cohésion pour le cadre financier pluriannuel 2021-2027 a été définie dans l'accord de partenariat de la Commission avec la Pologne.

Réformes de l'état de droit et procédure visée à l'article 7, paragraphe 1

La Pologne a clairement exprimé sa volonté de répondre aux préoccupations de longue date en matière d'état de droit et s'est engagée à travailler sur la base des recommandations de la Commission. À cet effet, les autorités polonaises ont présenté au Conseil Affaires générales du 20 février un plan d'action visant à traiter les questions soulevées par la Commission dans le cadre de la procédure en cours au titre de l'article 7, paragraphe 1. Bien que la procédure visée à l'article 7, paragraphe 1, ne soit pas, en tant que telle, directement liée aux deux actes adoptés aujourd'hui, le plan d'action est complémentaire et témoigne de l'engagement plus large de la Pologne à résoudre les problèmes en suspens en matière d'état de droit et à définir clairement la voie à suivre pour y parvenir.

Pour en savoir plus

Questions et réponses

Règlement portant dispositions communes

Accord de partenariat avec la Pologne – 2021-2027

Site web consacré au plan pour la reprise et la résilience de la Pologne

Citation(s)

 

Aujourd’hui est un jour historique pour la Pologne. Grâce aux efforts qu’elle a consentis pour rétablir l’état de droit, nous sommes désormais en mesure de débloquer l’accès aux fonds de NextGenerationEU et aux fonds de cohésion. Nous estimons que la Pologne a atteint ses 38 premiers jalons et cibles en engageant des réformes majeures. L’une des principales mesures du plan polonais est d'investir dans le secteur agricole, afin d’aider les agriculteurs et les pêcheurs à moderniser leur production et à accéder à de nouveaux marchés. Les mesures visent également à améliorer l’aide à la garde d’enfants et la qualité de l’air, ainsi qu’à renforcer la résilience et la compétitivité de l’économie. Une fois le feu vert donné par les États membres, la Pologne recevra 6,3 milliards d’euros. La Pologne pourra également commencer à demander des remboursements pour des investissements réalisés au titre de la politique de cohésion.

Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif pour une économie au service des personnes

 

Aujourd’hui, nous tournons la page des problèmes d’état de droit avec la Pologne et reconnaissons les progrès importants accomplis par le gouvernement. Les jalons judiciaires du plan pour la reprise sont respectés. La Commission a fait preuve d'objectivité et a apporté son soutien, comme elle l’a toujours fait par le passé.

Věra Jourová, vice-présidente chargée des valeurs et de la transparence

 

La Pologne a répondu efficacement aux préoccupations exprimées par la Commission sur les questions liées à l’état de droit qui empêchaient le déblocage des fonds de cohésion. Cela signifie que la Pologne peut commencer à demander des remboursements pour des investissements réalisés au titre de la politique de cohésion et d’autres programmes dans les semaines à venir. C’est une bonne nouvelle pour les entreprises et les citoyens polonais, qui vont avoir accès aux fonds de l’UE pour financer des programmes de formation, des services de garde d’enfants, des soins de longue durée et des infrastructures numériques, pour ne citer que quelques exemples.

Nicolas Schmit, commissaire à l'emploi et aux droits sociaux

 

L’accès de la Pologne à l’aide de l’UE dont elle a tant besoin avait été bloqué en raison de graves préoccupations concernant l’état de droit. Les progrès accomplis par le gouvernement polonais pour répondre à ces préoccupations sont une bonne nouvelle, en premier lieu pour le peuple polonais, mais aussi pour tous les Européens vivant dans notre Union de démocraties et de valeurs communes. Et c’est une bonne nouvelle pour l’économie polonaise, qui devrait désormais bénéficier d’un accès aux fonds de cohésion et à NextGenerationEU. La Commission continuera à défendre l’état de droit dans l’ensemble de l'Union en utilisant tous les outils à sa disposition.

Paolo Gentiloni, commissaire à l'économie

 

Je salue la détermination du gouvernement polonais à renforcer l’état de droit et l’indépendance de la justice. Les décisions prises aujourd’hui par la Commission reflètent les mesures positives adoptées par la Pologne dans ce domaine.

Didier Reynders, commissaire à la justice

Détails

Date de publication
29 février 2024
Auteur
Représentation au Luxembourg